Né à Pointe-Noire (capitale économique du Congo), devenu aveugle depuis l’âge de 5ans à la suite d’une intervention manquée de la cataracte congénitale en 1981;  j’entame mon cursus scolaire à l’Institut National des Aveugles du Congo (INAC). Ce temps passé à l’INAC s’échelonne entre 1984 et 1999, où j’obtiens en 1990 le Certificat d’Etude Primaire et Elémentaire (CEPE), le Brevet d’Etude du Premier Cycle (BEPC)  en 1996, le baccalauréat série A4 en 1999 où je sors majore de la première promotion des bacheliers de l’INAC.

Ayant éprouvé toutes les difficultés  pour être accepté dans une université publique ou privée, j’ai passé un temps d’oisiveté qui finalement m’a conduit à tenir une cabine téléphonique. J’ai vendu du pétrole et des vêtements à crédit: ma principale motivation était de devenir autonome dans la vie. J’ai réalisé avoir perdu la vue et non la vie, j’avais des pensées illimitées, je regardais ce que je pouvais faire, et non ce que je ne pouvais pas faire. D’ailleurs l’une des qualités que je possède, selon certaines sources, c’est le pouvoir de conviction à toute épreuve : je ne recule devant rien, infatigable dans la poursuite de mes objectifs. D’autres disent de moi que je suis un très bon négociateur. 

 

Le handicap visuel n’est pas un obstacle pour la réussite sur cette terre comme en témoigne ma vie. Je suis marié depuis 2006 et père de trois enfants. J’ai vaincu le grand désarroi des parents, amis et connaissances, toute sorte de doutes au sujet de mon avenir. J’ai appris à cultiver la terre en étant aveugle  et cela est vraiment possible, j’ai  fait  partie de la trentaine d’aveugles qui ont cultivé un champs de manioc de deux (2) hectares à  NKOUO à environ 80 km au nord de Brazzaville. J’ai gagné des revenus, de l’autonomie et de la considération de la part des voyants.

Par ce travail,  je mène un combat sans relâche pour la dignité des aveugles, décoré ambassadeur de la paix par le représentant de l’UNESCO au Congo, lauréat de l’ONG Belge Echo Communication en 2010, je suis fière d’avoir étudié avec cette écriture spéciale qui est le braille.

Engagé dans la fonction publique en 2010, j’ai poursuivi des études universitaires six (6) ans après, où j’obtiens respectivement  le Brevet de Technicien Supérieur (BTS) en Administration et Gestion du Personnel, une licence en management des ressources humaines en 2018 à l’Institut de Gestion et de Développement économique (IGDE). Jadis, à l’INAC pour y être admis, il faut avoir au minimum quinze (15) ans et au maximum vingt-cinq (25) ans, ce qui m’a révolté car certains aveugles devenaient des laissés-pour-compte parce qu’ils n’ont pas l’âge requis pour intégrer l’INAC.

Voilà l’une des raisons pour laquelle j’ai créé l’ONG Viens et Vois pour remédier en partie à cette situation mais aussi faciliter l’accès à la connaissance biblique et l’acquisition de la littérature chrétienne en braille. Petit à petit, tous mes collaborateurs et moi-même, nous devenons des bâtisseurs d’avenir pour cette couche spécifique de la population, la place dans la société est retrouvée et nous regagnons la considération et le respect.

Je suis le chef d’orchestre de Viens et Vois mais je suis évidemment soutenu par d’autres. Ce qui me plait le plus, c’est la manière dont toute l’équipe se complète, mon voyage vers le pays du bonheur auquel aspirent les non-voyants risque d’être encore long.

A travers l’ONG Viens et Vois, j’ai de nombreuses opportunités tant au niveau national qu’international et cette considération a été tout à fait notoire même au sein de mon église où j’ai été consacré en 2015 au ministère de l’enseignement (Docteur) et responsable d’une assemblée locale.